![]() et tous les sites que vous trouverez avec bonheur sur Google!!!
* «Lire, confie Christian Bobin, c'est débroussailler dans son âme un chemin que les ronces et les arbres effondrés ont depuis longtemps recouvert, puis avancer jusqu'à découvrir un château en ruine dont les fougères sont les princesses et les liserons les sentinelles.»
*
C'est pour rejoindre en silence cet amour qui manque à tout amour... (La Part Manquante) Au lever de la vie, à l’aurore des
yeux,
La lecture entre bien plus tard dans
l’enfance. Il faut d’abord apprendre, et c’est comme une
souffrance, les premiers temps de l’exil. On apprend sa
solitude lettre après lettre, le doigt sur le cœur,
soulignant chaque voyelle du sang rouge. Les parents sont
contents de vous voir lire, apprendre, souffrir. Ils ont
toujours secrètement peur que leur enfant ne soit pas
comme les autres, qu'il n'arrive pas à avaler
l'alphabet, à le déglutir dans des phrases C'est un mystère, la lecture. Comment
on y parvient, on ne sait pas. Les méthodes sont ce
qu'elles sont, sans importance. Un jour on reconnaît
le mot sur la page, on le dit à voix haute, et c'est
un bout de dieu qui s'en va, une première fracture du
paradis. On continue avec le mot suivant, et l'univers qui
faisait un tout ne fait plus rien que des phrases, des
terres perdues dans le blanc de la page. Il y a, c'est vrai, un grand bonheur de
cette perte-là, de cette trouvaille première
de la lecture, de sa capacité à
déchiffrer une page, à contempler les ombres.
C'est même plus fort que du bonheur, il faudrait pour
être juste parler de joie. Après, après cette première fin du monde, autre chose commence. Pour beaucoup, l'ennui. Avec la lecture tu achètes quelque chose qui pour toi n’a pas de valeur seulement un prix : une place sur le banc de la classe, un rôle dans les bureaux ou les usines. Alors tu laisses tomber. Tu lis juste ce qu’il faut, par obligation. Plus de joie là-dedans, pas non plus de plaisir : rien que de l’obéissance, ce qu’il faut d’obéissance pour aller jusqu’à la fin des études, aux portes du désert. Après tu ne lis rien, même pas
le journal, tu fais partie de ces gens qui n’ont pas un seul
livre dans leur maison –ces gens-là, un vrai
mystère pour les écrivains, ces maisons sous
les sables, ces vies où rien ne peut entrer, ni le
diable ni les livres. Parfois un dictionnaire, une
encyclopédie vendue par un représentant plus
malin que les autres, mais on ne les lira pas, c’est pour
les enfants, pour le futur, pour les mauvais jours, c’est
comme un meuble, un meuble un peu étrange, pas en
chêne ou en pin, un petit meuble de vingt volumes
papier, Parfois aussi il se passe quelque chose, pour quelques-uns, moins nombreux, bien moins nombreux. Ceux-là sont les lecteurs. Ils commencent leur carrière à l’âge où les autres abandonnent la leur : vers huit, neuf ans. Ils se lancent dans la lecture et bientôt n’en finissent plus, découvrent avec joie que c’est sans fin. Avec joie et frayeur. Ils s’en tiennent au début, à la première expérience. Elle est indispensable. Ils liront jusqu’au soir de leur vie en s’en tenant toujours là, au bord de la première découverte, celle de la solitude, solitude des langues, solitude des âmes. Avec ravissement ils quittent le monde pour aller vers cette solitude. Et plus ils avancent, et plus elle se creuse. Et plus ils lisent, et moins ils savent. Ces gens-là sont ceux qui font vivre les écrivains, les libraires, les éditeurs, les imprimeurs. Les grands livres, les mauvais livres, les journaux, tout est bon à qui aime lire, tout est nourriture à l’affamé. D’un côté ceux qui ne lisent jamais. De l’autre ceux qui ne font plus que lire. Il y a bien des frontières entre les gens. L’argent, par exemple. Cette frontière-là, entre les lecteurs et les autres, est plus fermée encore que celle de l’argent. Celui qui est sans lecture manque du manque. La muraille entre les riches et les pauvres
est visible. Elle peut se déplacer ou s’effondrer par
endroits. La muraille entre les lecteurs et les autres est
bien plus enfoncée Il y a des riches qui ne touchent aucun
livre. Il y a des pauvres qui sont mangés par la
passion de lire. Ceux qui ne lisent jamais forment un peuple taciturne. Les objets leur tiennent lieu de mots : les voitures avec sièges en cuir quand il y a de l’argent, les bibelots sur les napperons quand il n’y en a pas. Dans la lecture, on quitte sa vie, on l’échange contre l’esprit du songe, la flamme du vent. Une vie sans lecture est une vie que l’on ne quitte jamais, une vie entassée, étouffée de tout ce qu’elle retient comme dans ces histoires du journal, quand on force les portes d’une maison envahie jusqu’au plafond par les ordures. Et il y a tous ceux qui n’ont pas de main –privés d’or, privés d’encre. C’est pour ça qu’on écrit. Ce ne peut être que pour ça, et quand c’est pour autre chose c’est sans intérêt : pour aller des uns vers les autres... pour en finir avec le morcellement du monde, pour en finir avec le système des castes et enfin toucher aux intouchables, pour offrir un livre à ceux qui ne le liront jamais. " Une petite robe de fête Ed.Gallimard "C'est toujours l'amour qui est
blessé, *** AIMER Vous attendez de l'amour qu’il vous comble. " Le très bas " * "L'amour est un roi sans puissance, dieu est un homme qui marche bien au-delà de la tombée du jour.
***
*** À quoi reconnaît-on les gens fatigués. À ce qu'ils font des choses sans arrêt. À ce qu'ils rendent impossible l'entrée en eux d'un repos, d'un silence, d'un amour. Les gens fatigués font des affaires, bâtissent des maisons, suivent une carrière. C'est pour fuir la fatigue qu'ils font toutes ces choses, et c'est en la fuyant qu'ils s'y soumettent. Le temps manque à leur temps. Ce qu'ils font de plus en plus, il le font de moins en moins. La vie manque à leur vie. qu'on reçoit et qui vont fondre" Christian Bobin la poignée de lumière suffisante pour éclairer un peu plus loin que soi - vers l'autre là-bas, comme nous, égaré dans le noir. Et une sélection de textes de Bobin envoyée par mon amie Régine Foucault ( Liens dans Amis de Pierrot) Il nous faut naître par la chair et ensuite par l'âme. Les deux naissances sont comme un arrachement. La première jette le corps dans le monde, la seconde balance l'âme jusqu'au ciel. en faisant tout pour qu'il puisse en disposer - s'il le souhaite, quand il le souhaite. L'intelligence, c'est l'amour avec la liberté. Nous n'habitons même pas la terre. Le coeur de ceux que nous aimons est notre vraie demeure. (La plus que vive) * Le monde n'est si meurtrier que parce qu'il est aux mains de gens qui ont commencé
par se tuer eux-mêmes,par étrangler en eux toute confiance instinctive,
toute liberté donnée de soi à soi. nous allons d'un événement à l'autre et il faut parfois des années pour qu'un événement succède à un autre. Entre les deux, le vide. Enfin, pas tout à fait:.. Survient parfois la belle lumière d'un visage, d'une parole, d'un geste. qui n'a pas besoin pour chanter de posséder la forêt, pas même un seul arbre. que l'on assombrit chaque fois que l'on prétend être quelqu'un, ou savoir quelque chose. Tu as déjà vu une éclipse ? Eh bien c'est ça : la lune qui se glisse devant le cœur, et le cœur qui ne donne plus sa lumière. comme si rien n'était plus important que de faire des choses, vite, beaucoup. sinon bonjour, bonsoir, je t'aime et je suis là encore, pour un peu de temps vivante sur la même terre que toi. ( La folle allure) mais pour se donner le temps d'en venir à une autre qui, seule, nous ressemblera.
![]() pour dire ce qu'est ta vie dedans ma vie: cet air si nécessaire à la pensée et au rire, cet air qui rafraîchit mon coeur et fait de ma solitude une place battue par les vents Christian Bobin * Une rencontre spirituelle avec Christian Bobin ... http://bourgogne-franche-comte.france3.fr/emissions/20417910-fr.php Extraits de la rencontre avec Christain Bobin...Tout sonne vrai à l'entendre!!! Une phrase très belle d'un gitan dit: "La plus belle vie, c'est la vie qui a connu beaucoup de souffrance" Ma révolte concernant les églises et la foi? Quête de la pureté? **** Un texte tiré de son livre "La sérénité du vide" Il est atypique mais merveilleux!!! Dieu, c'est le nom de quelqu'un qui a des milliers de noms. Il s'appelle silence, aurore, personne, lilas, et des tas d'autres noms, mais ce n'est pas possible de les dire tous, une vie entière n'y suffirait pas et c'est pour aller plus vite qu'on a inventé un nom comme celui-là, Dieu, un nom pour dire tous les noms, un nom pour dire quelqu'un qui est partout, sauf dans les églises, les mairies, les écoles et tout ce qui ressemble, de près ou de loin, à une maison. Car Dieu est dehors, tout le temps, par n'importe quel temps, même l'hiver, et il s'endort dans la neige et la neige pour lui se fait douce, elle ne lui donne que sa blancheur avec quelques étoiles piquées dessus, elle garde pour elle la brûlure du froid. Dieu n'a pas de maison, il n'en a pas besoin et d'ailleurs lorsqu'il voit une maison, il ouvre les portes, déchire les murs, brûle les fenêtres et c'est tout qui entre avec lui, le jour, la nuit, le rouge, le noir, tout et dans n'importe quel ordre, et alors, et alors seulement, les maisons deviennent supportables, alors seulement on peut les habiter, puisqu'il y a tout dedans, le soleil, la lune, la vie très folle, la douceur très grande de la folie, les yeux pervenche de la folie. Et Dieu repart ailleurs, toujours ailleurs : à force de traîner les chemins, de s'endormir partout, dans les sources, dans les fougères, dans le nid des mésanges ou dans les yeux des tout-petits, Dieu a une drôle d'allure, vraiment. Lorsqu'il n'ouvre pas toutes grandes les portes, Dieu ne fait rien. Ce serait là son métier : ne rien faire. C'est un métier très difficile, il y a très peu de gens qui sauraient bien le faire, qui sauraient ne rien faire. Dieu, lui, fait cela très bien. De temps en temps, pour se reposer, il s'arrête de ne rien faire : alors il fait des bouquets ; il cueille toutes les lumières du monde, même celles des orages et des encriers, il en fait des bouquets mais ne sait à qui les offrir. Ou bien il met un coquillage tout contre son oreille et il écoute des musiques, toutes les musiques du monde, longtemps il écoute et c'est comme un flocon dedans son coeur, un tourment d'écume, le premier âge de la mer, l'immensité de la mer dedans son coeur et Dieu se met à rire et Dieu se met à pleurer, parce que rire ou pleurer, pour Dieu c'est pareil, parce que Dieu est un peu fou, un peu bizarre. Et si on lui demande ce qu'il a, il dit qu'il ne sait pas, qu'il ne sait rien, qu'il a tout oublié le long des chemins et qu'il a perdu la tête, perdu son ombre, qu'il ne sait plus son nom. Et puis, il rie, et puis il pleure, et il s'en va, et il s'en vient, et c'est le jour, puis c'est la nuit, et puis voilà, c'est toujours comme ça, toujours, chaque jour. *** Cela me fait penser à ce passage de l'Evangile, quand Jésus dit à la samaritaine que viendra bientôt le temps où l'on adorera Dieu partout où il est Ci-dessous, une superbe vidéo qui plaira à tous!!!
Marie, une amie fidèle d'ARCIEL88, nous a fait part de son bonheur à lire Christian Bobin: *****
On fait quelques pas hors de l'enfance, puis très vite on s'arrête. On est comme un poisson sur le sable. On est comme celui qui piétine dans sa mort, un adulte. On attend. On attend jusqu'à ce que l'attente se délivre d'elle même, jusqu'à l'équivalence d'attendre, de dormir ou mourir. L'amour commence là - dans les fonds du désert. Il est invisible dans ses débuts, indiscernable dans son visage. D'abord on ne voit rien. On voit qu'il avance, c'est tout. Il avance vers lui-même, vers son propre couronnement. Ainsi vous ai-je vu avancer dans la poussière d'été, toute légère dans votre robe toute blanche. Celle qu'on aime, on la voit s'avancer toute nue. Elle est dans une robe claire, semblable à celles qui fleurissaient autrefois le dimanche sous le porche des églises, sur le parquet des bals. Et pourtant elle est nue - comme une étoile au point du jour. A vous voir, une clairière s'ouvrait dans mes yeux. A voir cette robe blanche, toute blanche comme du ciel bleu. Avec le regard simple, revient la force pure. Je vous reconnaissais. Vous étiez celle qui dort tout au fond du printemps, sous les feuillages jamais éteints du rêve. Je vous devinais depuis longtemps déjà, dans la fraîcheur d'une promenade, dans le bon air des grands livres ou dans la faiblesse d'un silence. Vous étiez l'espérance de grandes choses. Vous étiez la beauté de chaque jour. Vous étiez la vie même, du froissé de vos robes au tremblé de vos rires. Vous m'enleviez la sagesse qui est pire que la mort. Vous me donniez la fièvre qui est la vraie santé. Et puis vous êtes partie. Ce n'était pas trahir. C'était suivre le même chemin en vous, simple dans ses détours. Vous emportiez avec vous la petite robe de neige. Elle ne dansait plus dans ma vie. Elle ne tournait plus dans mes rêves. Elle flottait sous mes paupières lorsque je les fermais pour m'endormir, juste là : entre l'œil et le monde. Le vent des heures l'agitait fiévreusement. L'orage des chagrins la rabattait sur le coeur, comme un volet sur une vitre fêlée. Qui n'a pas connu l'absence ne sait rien de l'amour. Qui a connu l'absence a pris connaissance de son néant - de cette connaissance lointaine qui fait trembler les bêtes à l'approche de leur mort." Christian Bobin - Une petite robe de fête
FAIRE ENTRER L'ETERNEL !!!
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